Passe-chasseur

© Camilla Adami
penché pensivement sur l’animal mort qu’il a tué lui-même
dans la chaleur odoriférante du poil et de la chair rouge
il s’attendrit sur sa propre vie
le matin éclaire comme à travers un vitrail
il fixe loin devant lui le passé
lente très lente activité de l’œil
tous ses espoirs mis dans la féminité
plus qu’elle n’en peut porter
parce qu'elle porte aussi les espèces rampantes


la prairie accueille la cathédrale

la nuit se heurte aux marées montantes et descendantes
des maria lunaires
la nuit se heurte aux feuilles caduques

le chasseur traque de bonne-heure
il dit et ça ne veut rien dire
L’orgueil est une qualité à la résistance de l’air
le chasseur invente l’aigle orgueilleux
le cerf orgueilleux
le défaut de l’orgueil
la philosophie

la déception n’existe pas

je voyage encore sur le sol engourdi de la rêverie plate
les marchands de bourgeons s’installent dans les brouillards
mais qui résiste à l’air
pire il y a le repos sur les fontaines rouillées
la nage dans l’oxyde
la miette qui exige une compagnie esthétique
il y a les bancs il y a les solitaires
il y a les villes il y a les solitaires
il y a les bâtisses ciselées et la mousse ennemie
et l’oiseau sans faiblesse


la cathédrale ressemble aux reliefs de l’homme
qui ressemble à dieu qui se souvient de quelque chose
comme l’architecture

la déception n’existe pas
il reste les pays
il reste les espèces rampantes
il reste les chants féminins étalés sur le sable tant que la mer le permet

la pauvre chose morte décidément impérissable
accomplit les rites humains en saignant de la gorge
longtemps après le sang

le chasseur pense parfois à l’oiseau
sinon l’espace n’est pas si grand

il faut aller
il faut venir
une race n’a pas de plaisir

le chasseur attend la construction des saints-lieux pour croire
il se recueille ainsi penché vers le viseur
où le détail est
mince filet d’eau qui coule de l’animal noir
mince filet hors de la mer
où grouillent des milliards de branchies brûlantes
des milliards de gueules tendues laidement vers l’air mortel

pauvre chose morte ranimée
revenue
la beauté est un excès de science
un excès de calculs est une ignorance

je guéris du mal terrien
Ainsi penchée sur les guerres
repue malgré les chasses maigres
penchée vers la guérison des femmes
invisibles debout si la terre est ruinée

la naissance de l’homme est un grand malheur



Illustration du texte : Camilla Adami "Retroscena", 2006. Techniques mixtes sur toile, polyptyque, 220 x 550 cm, © Camilla Adami.

Par (nos) chemins

©Camilla Adami
une
toujours nue
désire pour elle seule
une autre nudité
qui couvrirait la sienne
une
désire pour elle seule
la chaleur
d’une autre nudité
qui aussi veut le chaud
d’avoir connu le froid
d’avoir connu les yeux
transperçant les tissus
de quels tissus je parle ?
je parle de la peau

en dehors de la peau
ce qui couvre le corps
est tissu de mensonges


Camilla Adami, "Nudo", 1985, 1986, crayon sur papier.  © Camilla Adami

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