©Jill Orr
Boire jusqu’au flacon de verre qui se liquéfie entre nos mains
boire ce que notre regard angulaire nous permet de voir
et qui se liquéfie derrière nos orbites
boire le sang de tout ce qui a vécu vit et vivra
et ça n’est pas assez
boire les rivières
les océans
les cascades
les lagunes
les flaques
les gouttes de pluie dévalant les carreaux
boire la sueur des scientifiques qui
portant Panákeia à bout de bras
s’entraînent à courir à vitesse surhumaine
afin de devancer un jour !
l’arrivée Gare-du-nord
des dommagés humains
boire pour vider la terre
de ce qui y circule
de ce qui hydrate à perte
depuis que nous sommes rois et reines
en vrai soir et sirènes
boire les fluides crachés à la face des garciennes du cosmos
et — sans poésie
boire la rosée
boire les assoiffés
et ça n’est pas assez
les abeilles mellifères assoiffées
les virus assoiffés
les désirs assoiffés
essorer entre nos poings
les poumons des noyés
boire les éclaboussures cuivrées
des baignades pacifiques
boire notre propre soif
le souvenir de la soif
boire jusqu’à ce qu’il n’y ait plus de fois
boire jusqu’à ce que l’incendie devienne sans remède
et encore et encore jusqu’à la déification du remède
et — sans poésie
boire les mots à blanc
©Photo Jill Orr, Bleeding trees 7
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